
Depuis plus d’une année que je scrute et lis régulièrement le descriptif et la topo de cette cavité, dans l’inventaire spéléo du Doubs N°4, située à quelques km de mon Domicile…

Renseignements pris auprès des copains du club, avec les coups de pouces et les recommandations des uns et des autres (merci Jean Lou, Christophe, Guy et Catherine), on se fixe le samedi 8 Mars comme date pour cette sortie. Forts des conseils, nous sommes partis, Mél et moi,
sous terre avec une corde (vieille corde de grimpe d’environ 15m) au cas où nous atteignions la cascade située à plus de 1km du début de la cavité. La journée est printanière, grand beau temps, pas de précipitations annoncées. Les combis néoprènes sont prêtes, selon les recommandations de chacune et chacun, ainsi que les gants et chaussettes néo. Suivant les instructions de la topo partagée par Guy, on laisse la voiture sur le bord de la route quelques centaines de mètres après la sortie de St Hyppolite direction Montécheroux, non loin des fermes de la petite et grande Roche. Malgré la date plutôt précoce dans le calendrier, il fait vraiment bon. Le chant des oiseaux nous accompagne, de même que de nombreux papillons. N’ayant pas trouvé d’autre solution au vu du matos à disposition (nous n’avons qu’un seul Kit), on décide malgré tout d’enfiler les néo dès la voiture, se disant qu’on marcherait lentement pour supporter la chaleur !

Alors autant se le dire, cette décision ne fut pas des meilleures ! Sauf si vous êtes en quête d’une sudation soutenue le temps d’une quarantaine de minutes pour la marche d’approche, il est préférable de prévoir d’enfiler les néo une fois dans le porche ! Car ce dernier est haut perché, et les 10 dernières minutes furent en mode cocotte-minute, sous le regard surpris des promeneurs présents sur le site.

Sitôt arrivés dans le porche, dont les dimensions sont colossales, la température se calme. On se croirait dans un décor fantastique digne de Tolkien ! Le temps d’une bonne réhydratation, et nous voici partis pour la descente des marches menant au collecteur. Quelques mètres avant d’entrer dans l’eau, on voit des restes de fruits abandonnés là, par de précédents promeneurs peu scrupuleux ! bananes et clémentines…no comment ;( on en trouvera même jusqu’un peu plus loin dans les premiers mètres de la rivière. Nous voici donc dans la galerie baptisée Cloaca Maxima, du fait de son état passé dignes des égouts de la ville de Rome ! Plus rien de tout cela aujourd’hui ! La progression est simple au début, le fond de rivière est fait de sable et petits cailloux, et l’ambiance est dès
le début une grande folie de concrétion qui nous entoure, dans une longue galerie aux plafonds de hauteur permettant de progresser debout, ou a minima, bien courbé. Quelques passages à 4 pattes sont toutefois nécessaires, mais nos yeux sont émerveillés de ces beautés, des couleurs et formes qui s’offrent à nous. Draperies, stalagmites et stalactites par centaines, des fistuleuses partout, des bénitiers, des fossiles, c’est complètement dingue. J’ouvre le passage, devant Mél, peu rassurée par ce que décrit la topo, plus loin, concernant l’ambiance aquatique qu’elle redoute.

Soudain, le plafond s’abaisse franchement, et au-delà de quelques rideaux de concrétions, la galerie continue en semblant passer « sous » de grosses pendeloques. Il faut s’en approcher pour trouver le passage, à chaque fois. Il y a entre 20 et 50cm de profondeur d’eau, et un jour de 10 à 20 cm entre le bas des concrétions et l’eau. Les voûtes mouillantes forment le passage du « Terminal Fournier ». On y va tranquillement, pour que Mél prenne ses marques, on reste toujours « à portée de lampe ». L’enchainement des pendeloques et voutes mouillantes est super ludique, en mode « par où ça passe ? » jusqu’à ce qu’on arrive soudainement dans une zone beaucoup plus profonde. Après une pause « anti-panique » permettant à Mél de tester les avantages de la neo, en mode « ça flotte tout seul », nous voici lancés à passer sous ces barres de voutes mouillantes. On n’a pas pied, Mél me tient pour se rassurer, mais on passe sans problème, avec de l’eau au niveau du bas du cou. La sortie de cette zone est étroite et profonde, genoux collés de chaque côté, et évitement des concrétions diverses.

De magnifiques coulées de calcite, remplies de gours, récompensent cette traversée de passage peu aisé, quelle merveille ! Il faut rester vigilant tant les colonnes et stalagmites sont présentes et barrent parfois le chemin. (Merci le casque pour m’avoir si bien protégé des chocs nombreux !) La progression continue dans ce décor féérique, sous nos yeux ébahis et les superlatifs d’émerveillement. Arrivés à environ 700m de l’entrée, nous sommes face à une haute coulée de calcite devant laquelle descend une corde à nœuds (en mauvais état). L’étroitesse de la cavité permet heureusement de grimper en opposition pour éviter de changer cette corde fixe. Arrivés au sommet de cet obstacle, ambiance plus active, avec une succession de petits bassins et de petites chutes d’eau. Après quelques temps nous arrivons au pied d’une énorme coulée de calcite sous de hauts plafonds,
et la rivière siphonne à nouveau devant nous. En remontant la calcite, se présente devant nous une petite ouverture derrière laquelle coule une cascade, dévalant la roche par le plafond en provenance de la gauche. C’est peu engageant, et j’y vais avec prudence pour éviter de boire la tasse bêtement ! Juste derrière, le volume est faible, mais juste assez grand pour se retourner… l’eau s’écoule en direction d’une petite « boite aux lettres » passant entre la roche et la calcite blanche et lisse… mais en n’y voyant absolument rien de ce qui est derrière. Je me faufile, ça coince au niveau de la boucle du MAVC, mais après 2 ou 3 efforts, ça finit par passer. Je profite du grip de la calcite pour freiner la descente, et constate avec joie que j’arrive sur la roche, et de nouveau les pieds dans la rivière. C’est à cet endroit exact où nous aurions dû voir que le bon passage était situé au plafond, en remontant de 2m environ la cheminée de coulée calcitique, pour shunter ce passage peu agréable.

Nous voici dans la galerie des Bocons, qui reste donc beaucoup plus active que cloaca Maxima, en tout cas nous rencontrerons de nombreuses petites chutes d’eau. La rivière s’écoule dans des successions de marmites plus ou moins comblées de limons. Nous remarquons également que l’eau est de plus en plus trouble. La progression est simple. Après quelques centaines de mètres et une bonne demie heure de progression, nous arrivons dans une zone où un grand vacarme d’eau se fait entendre… la cascade ! Nous y voilà.

Rapide repérage, ça coule plutôt fort. L’eau gicle sur la corde qui pendouille sur la gauche. J’attrape la corde, qui semble en meilleur état que ce qu’on aurait pu imaginer, mais ce qui m’inquiète c’est plutôt l’ancrage Vis/plaquette située plus haut, qui est complètement desserré, qui parait rouillé et bien entamé… pas le choix toutefois, on va y aller avec prudence mais je dois utiliser la corde en place. On est, selon la topo, à un peu plus de 1km de l’entrée. Je teste toutefois bien la corde en me pendant avec ma petite longe au pied de la cascade, dans cette corde, dans laquelle j’ai fait un nœud de 8 double. Rien ne bouge, allez, on y va. Mél me pare au cas où, et en 2 ou 3 pas, l’obstacle et ses 3m50 de haut est franchi pour moi. J’en profite pour installer notre propre corde par-dessus le matos en fixe. La sangle située au-dessus est bien fichue,
et voyant l’état de la plaquette et ancrage, je confirme qu’il faut y aller mollo ! Corde en place, je fais une série de nœuds pour que Mél puisse s’y longer au besoin. Ça passe crème ! ouf !!! En avant ! Nous voici arrivés dans la galerie du mandarin. L’eau y est encore plus trouble qu’en bas, et cette fois-ci, plus de doute, c’est bel et bien l’eau qui est souillée, et pas juste des alluvions levés par les tourbillons de l’eau dans cette galerie bien active. L’atmosphère est chargée en odeur d’égouts, mélangeant odeurs lessivielles sur fond de station d’épuration !

Triste et étonnant de voir que malgré la topo qui signale ce problème déjà en 1987, indiquant que cela provient des égouts se déversant dans la perte des Tanneries en amont sur la commune de Chamesol, rien n’ait été amélioré en 40 ans !La progression est toujours aisée, attention toutefois aux chocs dans ces successions de marmites percées, laissant parfois des lames de roche tranchantes. Roche d’ailleurs bien agressives, les gants néoprène de Mél, pourtant neufs, donnent déjà des signes d’agonie !

Environ 15 minutes de progression plus loin, nous passons devant l’affluent 2. La galerie prend un franc virage à gauche, puis un autre à droite. Ce côté méandreux nous amène devant une zone fracturée en diaclase, donnant à nouveau sur des bassins.
Rapidement, le niveau d’eau monte, mais plus aucun courant. Les roches sont noires, la galerie à nouveau silencieuse. Mél s’arrête là où elle n’a plus pied, je continue dans ce corridor, et soudain, ça queute. Dans un silence étrange, tant le rythme de progression et de lecture optique est dense depuis le début de notre sortie, oui, soudain, plus rien ! Faisant demi-tour, je remarque toutefois une ouverture à droite, qui semble poursuivre sur quelques mètres. Mais au final, ce by-pass me fait me retrouver derrière Mél. C’est fini ! On est au fond, à 1565m de l’entrée.

Le retour s’amorce cela fait 2h qu’on est entrés. Rien de bien particulier, si ce n’est la redescente de la cascade, que nous avons géré en improvisant 1 descendeur avec 2 skifs et nos MAVC, afin de freiner la corde à la descente (nous avions laissé les nôtres à la maison). J’assure Mél depuis le haut, elle m’assure depuis le bas, un passage impressionnant mais la prudence nous a aidé à ce que tout se déroule de manière fluide et complice. Corde récupérée, let’s go !

Prochain point de doute, le passage étroit dans la calcite ! Une fois installés devant, j’aide Mél à grimper, en lui faisant des points de blocage pour ses appuis.
Elle s’y essaie par 2 ou 3 fois, et après 5 bonnes minutes de bagarre et de contorsions, elle finit par pouvoir passer ! Oups, comment vais-je faire. Je m’y essaie, sans pouvoir avancer du moindre mm…4 ou 5 essais, rien à y faire. Repensant rapidement à la topo, qui décrivait ce « shunt » par une cheminée de calcite, ça me fait tilte soudainement ! Oui, il y a bel et bien un trou à droite de cette coulée de calcite, et de longues colonnes de calcite semblant escaladables en opposition. 3 ou 4m de remonté en pure verticale, et me voici au-dessus de Mél, que j’entends et dont je vois la lampe !

Ouf, c’est la solution ! Je me laisse redescendre juste derrière cette coulée, et une fois au sol, plus qu’à se faufiler le long de l’affluent qui coule assez fort le long de la roche. C’est plus facile dans ce sens.

Trop contents d’avoir passé la difficulté, c’est avec les yeux grands ouverts et émerveillés qu’on refait le chemin du retour jusqu’à l’entrée. Les voutes mouillantes passent easy. La fatigue physique se fait toutefois ressentir, les jambes sont lourdes, je pense du fait de la compressions longues des néoprènes et du jus laissé dans la phase d’approche. Nous sortons de la grotte vers 18h15, pour un total d’un peu plus de 4h passées sous terre donc. Une cavité incroyablement belle que nous referons, c’est sûr ! Mél & Nico Une sélection de photos ICI Et un lien vidéo ICI